Focus sur les infirmières de l'éducation nationale en cette période d'épidémie.
Lors d'une manifestation en septembre, nous avions interrogé Françoise, l'infirmière scolaire
d'un collège. Nous l'avons recontactée pour lui demander en cette période d'explosion des contaminations au niveau des écoles, comment elle voyait la situation.
La situation est la même en plus grave car elle perdure. Ce n'est pas dans mon collège que la contamination est la plus forte, mais nous avons les contrecoups après 2 ans de pandémie. Les enfants ne sont pas bien psychologiquement avec cette ambiance anxiogène, certains ne veulent plus venir au collège, on parle de refus scolaire anxieux.
Or, il y a une grave pénurie de place ce qui empêche d' orienter vers des prises en charge psychologiques. Les psychologues en libéral ne sont pas remboursé.es, les pédopsychiatres sont débordé.es. Il faut compter 18 mois d'attente pour une consultation au CMP
Depuis une petite 10e d'année il n'y a pas eu de création de postes d'infirmier.ères scolaires et les besoins s'accroissent avec la pandémie. De plus, on peut noter un "malaise" profond chez beaucoup d' infirmier.ères : arrêts maladie, longues maladies, d'autres ont démissionné.
Interview de Françoise, le 23 septembre lors d'une manifestation de l'éducation nationale
Pourrais tu me dire pourquoi tu manifestais aujourd’hui ?
Dans l’éducation nationale c’est la 2ème rentrée covid et il n’y a aucune création de poste chez les infirmières scolaires. Une enquête du SNICS FSU en 2021 sur l’état de santé des infirmières au travail, une infirmière sur 2 est en souffrance au travail, burn out, insatisfaction dans le travail par manque de temps, de moyens, insatisfaction professionnelle.
Qu’est ce qui se dégrade dans le travail ?
Nos missions sont de plus en plus importantes et impossibles à réaliser correctement.
Tu peux les détailler ?
La mission prioritaire c’est l’accueil dans les infirmeries la deuxième c’est voir tous les élèves de 12 ans pour un bilan systématique.
(Dans le cadre de la prévention les médecins eux font un bilan systématique des enfants de 5 ans.)
Nous devons faire aussi de la prévention, nous sommes conseillères auprès des chef.fes d’établissement.
Peux-tu dire les conséquences sur les enfants de ce vous n’arrivez pas à réaliser.
Depuis 1 an et demi avec le covid ça s’est surajouté à nos missions. Quand il y a un cas covid il faut faire du tracing, beaucoup de tâches administratives en plus, ce qui enlève de notre disponibilité après des jeunes
On nous a demandé de faire des tests IGN qui sont peu fiables car ils donnent des faux positifs ; certaines infirmières ont été dédiées à cette tâche. Nous n’avons pas voulu faire les vaccins parce qu’ils auraient découverts les infirmeries.
Peux-tu expliquer votre travail auprès des jeunes ?
Notre première mission est l’accueil. Un élève se présente pour quelques raisons que ce soit. Notre consultation infirmière permet de faire un diagnostic ; c’est parfois difficile de savoir comment agir.
Il y a parfois possibilité de travailler avec des assistantes sociales scolaires et des psychologues de l’éducation nationale (anciens conseillers d’orientation également maltraités puisque de nombreux CIO ont été fermés) Ils peuvent faire des tests d'évaluation mais pas de suivi psychologique, leur position n’est pas confortable. Il.elle.s ont aussi des missions plus vastes avec le « parcours sup » qui est un stress important pour les élèves de lycée.
Et la prévention ?
Sur la santé en général, en individuel lors des passages à l'infirmerie, ou en groupe classe
On travaille en équipe pluridisciplinaire.
Depuis la loi de 2001, il est prévu 3 séances de 2 h d’interventions sur la vie affective et sexuelle à partir de la primaire.
Les questions de harcèlement, de consentement, de respect de soi de l’autre sont abordées, les stéréotypes de genre, égalité fille garçon…
Il est possible de travailler avec des associations pour faire des interventions autour de la sexualité mais souvent, ces intervenant.es sont payant.es. Nous devons remplir des dossiers des demandes de subventions
Quand tu dis que vous n’avez plus le temps de le faire c’est que vous n’avez plus le temps de faire cette prévention ?
La prévention individuelle se fait à chaque passage d’élève au collège. Concernant les écoles primaires de secteur ( 3 en plus du collège), nous intervenons principalement pour faire du suivi (visites de dépistages) sur les indications des professeur.es des écoles ou des dossiers médicaux. Mais, on peut noter qu’il est de plus en plus difficile pour les familles de trouver une orthophoniste (délais d’attente très longs) des dentistes qui ne reçoivent pas les patients avec la carte CMU ou pas les enfants, OPH qui ne prennent pas de nouveaux client.es...
Ex : si besoin de pratiquer des extractions dentaires chez les enfants (avec anesthésie), il est très compliqué d’avoir un rdv sur Clocheville.
Je souhaiterais intervenir dans les écoles primaires pour parler des discriminations entre les filles et les garçons, le respect de son corps, l’estime de soi…. Mais pas le TEMPS !!!!
Et la prévention collective est très chronophage, et nous sort de nos infirmeries donc plus d’accueil !
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