Émission de radio du 23 septembre sur la situation à l'hôpital avec Marie-Pierre Martin pour le Collectif 37 Notre Santé en Danger

Le Festi-lutte du 3 octobre étant reporté, les organisations participantes ont fait une émission de radio le 3 octobre de 12h à 14h sur radio béton 93.6.

Voici l'intervention que Marie Pierre Martin a faite à cette occasion, au nom du Collectif 37 Notre Santé en Danger

Les violences du système ont atteint des sommets dans la santé avec la crise sanitaire que nous venons de connaître. La gestion purement comptable menée par les gouvernements successifs ont amené les fermetures de lits, de services, d’hôpitaux et de maternités de proximité, et des suppressions de postes qui finalement ont obligé à ce confinement général qui aurait peut-être pu être évité si l’hôpital n’avait pas été laminé par ces politiques d’austérité. Pour rappel en 2019, 3400 lits ont encore été supprimés, il y en avait eu 4200 en 2018. Cette situation a considérablement aggravé les conditions d’accès aux soins, entrainant aussi des retards dans la prise en charge des autres pathologies, un reportage télé récent montrait cet impact qu’on commence juste à mesurer sur, par exemple, des femmes atteintes de cancer du sein qui auraient pu éviter d’avoir une ablation mais qui y sont contraintes parce que les tumeurs ont trop grossi.

La 2ème vague provoque de nouveau ce type de phénomène dans certaines régions où on ne peut déjà plus assurer le suivi de certaines pathologies.

Il y a eu beaucoup de mobilisations dans la santé depuis longtemps, qui ont aussi subit la répression et elles sont longtemps restées ignorées, puis avec la crise Covid, les soignants sont devenus des héros, et il y a eu le Ségur de la santé, qui n’a pas répondu aux attentes avec 183€ d’augmentation de salaires, qui même s’ils sont historiques, ne sont pas à la hauteur des demandes, 300€. Les contreparties sont très lourdes en terme de destruction de ce qui reste de l’hôpital public, avec la remise en cause des 35h, l’individualisation des temps de travail, les heures supplémentaires, les primes sur objectifs, l’intéressement et finalement la casse de l’unité de la fonction publique hospitalière, puisque chaque établissement pourra négocier des accords. On va aussi mélanger l’exercice libéral et hospitalier. Aujourd’hui on assiste à des départs massifs de soignants, qui quittent la profession et des difficultés de recrutement qui font dire que cette fois, l’hôpital va craquer. On voit qu’il n’y a rien à attendre des aménagements qu’on nous propose dans le cadre de ce système capitaliste, et qu’il y a une nécessité urgente à continuer à se battre ensemble, usagers et professionnels. Le 15 octobre il y aura une mobilisation nationale à Paris et en région, à Tours rassemblement à 15H place J Jaurès pour exiger des moyens pour se soigner.

Le Collectif Santé va aussi mener une campagne contre les dépassements d’honoraires, en 2019 30% des français ont renoncé aux soins et dans le même temps on nous annonce un déficit record de la sécurité sociale, dont Anne va nous parler.

Nous vous invitons également à écouter l'intervention de Mari-Pierre dans l'émission du mercredi 23 septembre sur la situation dans la santé.

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Le 4 avril, avec le social et le médicosocial

Jeudi 4 avril 2024, les secteurs social et médico-social étaient dans la rue, à l’appel de Sud Solidaires, la CGT, FO soutenus par le Collectif 37 Notre Santé en Danger.

Plusieurs établissements ou associations étaient représentés, dont La Boisnière, l’ADAPEI, l’Eveil, les Elfes, le CH de Luynes des étudiant.es de l’ITS….

Une travailleuse sociale et une AESH ont donné des éléments pour comprendre cette mobilisation nationale qui concerne à la fois le social et le médico-social, les pénuries dans l’un et l’autre secteur augmentant les difficultés pour les usager-ères: Et malgré un constat déjà alarmant, le gouvernement choisit de réduire les budgets de fonctionnement de plus d'un milliard d'euros cette année. 

Quand les Travailleur-ses Sociaux et médico- sociaux-les craqueront et n'en pourront plus, qui prendra en charge l'enfance en danger, les personnes vieillissantes, les personnes en situation de handicap, les personnes en insertion professionnelle, les personnes à la rue, les personnes sortant de prison, les personnes migrantes, les personnes mal logées, les personnes dont les accidents de vie empêchent de se nourrir, de se chauffer, de se vêtir ...

De quelle société voulons nous ?
  •  150 travailleurs et travailleuses sociaux et médico-sociaux en grève se sont rassemblé.es devant la préfecture avant de manifester jusqu'à l'ARS pour revendiquer:
    • La prime Ségur 183€ pour tous-tes! Sans conditions!
    • La sauvegarde de leurs conventions collectives ! 
    • Refus du décret d'1 milliard d'euros d'économies dans le social!
    • Mesures attractives pour le métier, augmentation de salaires!
    • De vrais moyens pour accueillir/accompagner dignement les personnes.
      Il y a 1,2 millions de travailleurs et travailleuses sociaux en France.
      En 2 ans il y a eu 150 000 départs à la retraite et 90 000 démissions depuis la COVID.
      30 000 postes restent non pourvus dans le social d' où :
  •  Les personnes âgées se retrouvent abandonnées et leurs familles en souffrance.
    • Par manque de places dans des établissements, elles sont maintenues à domicile avec peu ou pas du tout l'accompagnement nécessaire, les familles se retrouvent alors devoir les prendre en charge.
  • Il y a aussi les personnes en précarité financière, sans emploi, qui peinent à se loger (et au passage le gouvernement veut alléger la loi SRU qui garantit notamment la mixité sociale), les personnes en souffrance psychique, les personnes isolées, les personnes qui ont fui leur pays pour leur survie.... on a tous et toutes été, on est tous et toutes et/on sera tous et toutes confronté.es au travail social à un moment de notre vie. 
  • Une enfance en danger, puisque les enfants ne sont pas pris en charge.
    Lorsqu'ils devraient être placés, ils ne peuvent pas l'être par manque de personnel, de places dans les foyers d'accueils...
    On peut même parler de maltraitance pour les enfants qui ont besoin de soins dans le médico-social, mais qui n'en n'ont pas, par manque de structures spécialisées, de personnels, qui sont donc en "inclusion" dans les écoles en attendant... 
    • Inclusions sans les moyens nécessaires et maltraitantes également. Avec des AESH mutualisées qui accompagnent plusieurs enfants en même temps, qui n'ont pas les formations adaptées et pas en nombre suffisant par manque d'attractivité du métier, avec un salaire sous le seuil de pauvreté et rappelons également que ce sont en majorité des femmes encore une fois non reconnues pour leur travail.

Les travailleurs et les travailleuses sociaux d'aujourd'hui représentent la dernière digue. Elle est en train de péter !

Tout l'équilibre et le lien social que le travail social permet de maintenir est en train de s'effondrer !

Rappelons également que 90% des travailleuses sociales sont des femmes qui ne sont pas valorisées pour leurs compétences professionnelles, puisque ce système patriarcal considère que c'est un travail "inné" chez les femmes...

Le social se bat pour tout le monde!
Et tout le monde se bat pour le social!

Une travailleuse sociale et une AESH.

Intervention du Collectif Santé
Collectif 37 Notre santé en danger
collectifsante37@gmail.com

Témoignages sur l’évolution des soins à l’hôpital de Tours

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Trois femmes, interviewées par le Collectif Santé 37 : notre santé en danger, racontent leur expérience d’hospitalisation à Tours sur une période qui s’étale de 1986 à mars 2017.

Premier témoignage

En 1986 mon premier enfant est né par césarienne à la maternité du Beffroi1.J’ai ensuite fait une hémorragie. Mon hospitalisation a duré 14 jours afin que je récupère (pas de transfusion possible à l’époque) même si mon enfant se portait bien.

Deuxième témoignage

24 sept 2001 à la clinique du Parc Chambray les Tours : La naissance de mon aînée a dû se faire par césarienne. A l’époque on préconisait de rester alitée une semaine complète à l’hôpital avant de sortir. La sortie s’est donc faite 10 jours après l’accouchement, contrairement à ce qui se fait aujourd’hui.

11 juin 2014 à l’hôpital Bretonneau: Pour la naissance de ma cadette, j’ai été victime d’une grosse hémorragie (j’ai dû être transfusée d’1,6 l de sang). Le lendemain, on m’annonçait que je pourrais rentrer chez moi le 3ème jour après l’accouchement en HAD (Hôpital à Domicile) avec des soins pour une grosse épisiotomie. Me trouvant très faible, et avec 2 enfants qui m’attendaient à la maison, j’ai demandé si cela n’était pas trop tôt quand même. On m’a répondu que c’était mieux pour moi et que mes enfants seraient contents!

Bonjour la culpabilisation!

De retour à la maison, en effet j’étais contente de retrouver mes enfants, mais j’étais également très faible, très fatiguée et frustrée parce que je ne pouvais pas m’en occuper alors qu’ils me sollicitaient. J’aurais eu besoin de me reposer un peu plus et d’être dans un endroit calme ce qui n’était pas possible avec les enfants.

Les infirmières me prodiguaient des soins dans ma chambre, avec la risque qu’un enfant n’y pénétre par surprise. Ainsi, mon intimité de patiente n’était absolument pas respectée. Les mauvaises conditions de soins ont retardé la cicatrisation. L’hygiène chez soi n’est pas celle d’un hôpital.

L’infirmière me disait de me reposer davantage, mais comment faire ? Le médecin m’avait dit que je pouvais rentrer chez moi, cela signifiait donc que j’étais capable de reprendre mes activités familiales, sauf que je voyais que je n’y arrivais pas; quelquefois j’en pleurais de fatigue et de culpabilité. Je venais d’avoir un 3ème enfant et je me disais que je n’étais pas capable de m’en occuper !

J’ai mis un an à m’en remettre.

Troisième témoignage

sur l’évolution lors de 4 hospitalisations sur des périodes différentes et pour des pathologies différentes

​Février 1994 en gynécologie à Bretonneau : 10 jours d'hospitalisations pour une complication hémorragique au cours d’une intervention gynécologique
​février 2008 : dans le même service, 24 h d’hospitalisation suite à une opération d'un cancer du sein avec prescription d’un suivi infirmier externe

​Juillet 2016 : dans le même service, opérée pour une intervention gynécologique le vendredi, je suis sortie le lundi fin de matinée. Pourquoi ? Au regard de l'antériorité de mon dossier, la gynécologue qui m'opérait a décidé d'une journée d'hospitalisation en plus  que prévu pour ce type d’acte, mais elle - a dû justifier la raison de cette journée supplémentaire; là aussi je suis sortie avec une liste de n° de téléphone à contacter en cas de besoin et le nom de l'infirmière proche de mon domicile.

​Mars 2017 pose d'une prothèse de genoux  dans le service d’orthopédie à Trousseau : je devais sortir le mardi, le dimanche j'ai été informée de ma sortie pour le lundi par décision du cadre de santé

Voila les différents témoignages sur ce que j'ai vécu au cours de  mes hospitalisations mais je rend  hommage aux praticiens et personnels soignants pour leur dévouement dans un contexte de travail difficile.


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Ces récits qui s’étalent sur une période de 31 ans donnent une idée de la dégradation de la prise en charge hospitalière ; même s’il est question en 2001 d’un établissement privé, la clinique du Parc, les préconisations étaient les mêmes à cette période qu’à l’hôpital.

Ce qui frappe au niveau des accouchements, à 15 années d’intervalle, c’est qu’auparavant on laissait plus de temps aux femmes pour récupérer. Maintenant, les conditions particulières des patientes sont de moins en moins prises en compte, il faut respecter le protocole ! La culpabilisation des mères est un argument bien facile et particulièrement révoltant pour libérer les lits au plus vite.

Alors que les moyens techniques progressent, la condition des femmes ne s’améliore pas pour autant pour des raisons budgétaires !

La dictature de la diminution de la durée de séjour préconisée n’est pas une amélioration point s’en faut ! Les protocoles ne peuvent pas s’adapter à tout le monde surtout pour des raisons financières. Il fut un temps où on adaptait les soins en fonction des patients, pour un retour à la maison dans de bonnes conditions. A l’heure actuelle, la prise en compte de la rentabilité passe avant l’état de santé physique ou psychique du ou de la patient.e. Pour un accouchement c’est 3 jours, ensuite vous vous débrouillez avec les infirmiers libéraux ou dans de rares cas en HAD Hôpital à domicile. Le 2ème témoignage montre à quel point ces solutions peuvent être préjudiciables aux patientes.

La durée d’hospitalisation est fonction du protocole et non de l’état du patient ou sinon il faut le justifier, ce qui fait dire à une des femmes que le chirurgien est maintenant aux ordres de l'administration  et de sa logique comptable ​au lieu de donner la priorité au patient. Le retour à domicile dans n’importe quelles conditions pose d’autres difficultés ; avec la pénurie médicale dans de nombreuses régions, la sortie trop rapide peut amener un défaut de soins. De même, les infirmières à domiciles toutes compétentes qu’elles soient, sont surchargées de travail ; il y a donc des limites à cette politique imposée aux patients.

Une infirmière retraitée ayant travaillé dans les hôpitaux plus de 40 ans ajoute : respectez les patients en tenant compte de leurs besoins réels et les soignants retrouveront le plaisir du travail bien fait et ils rentreront chez eux certes fatigués mais satisfaits. Les objectifs comptables de l’hôpital mettent patients et soignants sur une ligne dangereuse alors que les moyens de bien soigner existent.

1 Annexe du CHU de Tours qui a été fermée en 2003